Monique

 

W. LABIDOIRE

Photo de classe

Passage à l'an neuf

 
 
 
 

 

 

Photo de classe


Le Je est désormais moi quand le temps ne suspend plus ses rites barbares et que des visages d’enfants explosent à l’orient de nos peurs. Vieillie dans un ressassement devenu atone et coutumier, ce que j’identifie comme âme de passage n’a plus mesure de battement et ne sait plus accueillir l’autre, cet autre aux multiples visages ridés de ce soleil éclatant la route de pierraille et de sable, cet autre qui faufile son corps et sa raison dans l’étrange espace de nos paysages.

Mais de quels paysages sommes-nous encore les gardiens ? Nous blottissons nos désirs dans l’étroitesse de nos cœurs usés avant d’avoir tremblé et nos gestes se pelotonnent dans l’édredon de nos enfances comme si jamais pardon n’était possible. Le vivant ne doit-il apprendre à mieux éradiquer les fièvres infectieuses pour combattre les mauvais penchants.

Quel chemin si redouté faut-il suivre pour que sonnent les cloches d’une réconciliation, pour qu’enfin la voix du muezzin accorde ses appels à la cloche de l’école du village et que les sourires des enfants soient une seule et belle image sur la photo de classe.

 

 

 

Passage à l’an neuf

 

D’une année l’autre, l’espace s’agrandit et le chemin étire ses pas de cendres dans la vallée du poème. Ceux qui ont déployé leurs ailes vers un ailleurs de nuit battent le jour de nos pensées alitées pour cause de nostalgie et il est bien lourd de recevoir en flux brutal les images flouées par la distance. Les visages, les gestes, la parole marquent leurs empreintes indélébiles et les séquences datées du temps s’impriment au noyau d’une souvenance tremblée chargeant de spasmes et de quelques regrets des nuances, des odeurs, un toucher léger et aimant. Tout brille de guirlandes et de victuailles. L’oie caquette avec toute une famille les chansons d’autrefois. Les marrons, les pommes au four, le choux rouge témoignent d’une affectueuse tradition et les gâteaux noirs de pavot ouvrent l’arc-en-ciel des possibles. La fièvre a gagné les replis les plus secrets de nos corps et notre peau suinte de parfums puissants tandis que nos désirs s’alarment d’un devenir menaçant. C’est toujours là-bas que l’on assassine, un là-bas multiple aux sabirs divers, aux croyances multicolores, un là-bas devenu des ailleurs tourmentés et qui frappent aux portes de nos maisons. Désormais l’étoile accrochée au sapin de nos rêves vient se coller au cœur du partage ayant comme seule destinée un voyage sans retour. Pourtant, nul ne résiste aux bulles et aux papiers dorés qui feront fête jusqu’à l’épuisement de la nuit

 

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